Cet article a pour sujet la mission toute spéciale de la femme d'être mère et de développer des sentiments et un amour maternels, pour éviter que notre société se déshumanise.

Source: Homme et femme il les créa. 3 pages.

Femme et mère

La fête des mères que nous avons pris l’habitude de célébrer dans nos sociétés occidentales, je ne sais trop pour quelle raison, suscite en nous nombre de réflexions. N’en contestons pas la légitimité, de peur de gâter la bonne humeur de nombre de mamans qui se réjouissent d’être, au moins une fois par an, l’objet d’une sollicitude et d’une affection particulières et souvent bien méritées. Ne décourageons pas davantage la bonne volonté des enfants qui, bien souvent, se comportent à l’égard de leur mère comme à l’égard de la bonne à tout faire, mais qui, exceptionnellement, une fois par an, s’offrent le luxe de l’honorer!

Cela dit, le problème moderne de la maternité n’est pas résolu par une journée de célébration et de démonstration d’amour envers celle à qui nous devons tant…

Selon le Dr Théo Bovet, écrivant il y a déjà plus de 40 ans, le rôle de la femme et de la mère a été en tout temps d’une grande importance, mais il revêt précisément de nos jours une importance décisive pour le monde entier. Car notre civilisation actuelle porte non seulement, comme on ne cesse de le dire, la marque de l’homme; elle a, en outre, considérablement évincé l’élément féminin maternel, ce qui l’a rendue inhumaine. L’image de l’être humain comporte l’homme et la femme. En l’absence de la femme, il n’y a pas d’être humain complet et, paradoxalement, pas d’homme non plus. Si donc notre civilisation doit redevenir humaine, si elle doit aussi produire de nouveau des hommes véritables, il lui faudra avant tout s’assimiler l’élément féminin maternel.

Or, pour ressusciter cette femme maternelle, il ne suffit pas de suivre quelques conseils psychologiques. Il ne s’agit pas non plus de lutter pour « l’égalité des droits de la femme », égalité s’exerçant si possible contre l’homme. Il est beaucoup plus nécessaire aujourd’hui que chaque femme s’efforce de redécouvrir la « mère » en elle-même pour la situer dans une correspondance efficace et constante avec l’homme paternel. Ce que la mère dit et fait est bien moins important que sa façon d’être présente.

L’homme adulte pensera moins aux exigences de sa mère qu’à celles de son père, mais il continue à regarder son visage affectueux à elle, il sent la protection de ses bras, il est certain de sa présence, jour et nuit, dans la pièce familiale, dans le jardin, dans la salle de jeux et auprès de son lit de malade. C’est là ce que signifie avoir une confiance totale à l’égard de quelqu’un. Et c’est à partir de là qu’il pourra aussi faire totalement confiance à celui (c’est-à-dire à Dieu) qui dit de lui-même : « Comme un homme que sa mère console, ainsi moi je vous consolerai » (És 66.13). La mère qui a donné cela à son enfant a accompli le sens de sa vie. Dans la perspective de la vie éternelle, elle a accompli une tâche plus grande que le plus intelligent des philosophes ou le plus puissant des hommes d’État, fût-elle une petite femme inculte et insignifiante.

« L’amour incommensurable, naturel, qui jaillit de la mère et en quelque sorte constitue l’espace vital dans lequel l’enfant se forme et se personnalise, cet amour signifie pour la mère qu’elle renonce à elle-même, qu’elle se sacrifie jusqu’à courir le risque de perdre sa propre personnalité et sa propre forme, et ce sacrifice lui-même est compris dans un sens héroïque, mais en même temps dépourvu de pathétique. De même que le moment héroïque de la mise au monde s’accomplit derrière le volet, l’héroïsme du reste de la vie de la mère s’accomplit dans une profonde discrétion. À la salle de travail succède la chambre des enfants : la mère, qui transmet la vie à l’infini, voit sa propre vie se dérouler dans l’infini des petites, des moindres peines. L’héroïsme de la mère est lié au secret et aussi au quotidien, à ce qui constitue la “moyenne” » (Gertrud von le Fort).

C’est uniquement parce que la femme s’est laissé éblouir par les formules abstraites et les réalisations techniques de l’esprit masculin qu’elle a pu mépriser cette mission, qui fut la sienne dans tous les âges, et s’imaginer que la vie pourrait « prendre de la valeur » si elle aussi apprenait le grec, si elle aussi faisait des discours politiques, ou seulement même si elle gagnait de l’argent en travaillant sur une machine quelconque. Bien souvent, pendant ce temps, ses enfants sont abandonnés dans des mains étrangères, ils deviennent les esclaves d’une manie, il faut les faire examiner par le neurologue ou encore, voyous, ils rôdent dans les rues comme des chiens sans collier… Et c’est notre civilisation tout entière qui, avec une vitesse folle, se précipite vers l’abîme.

Il est encore temps de faire marche arrière, mais il est réellement grand temps. Il faut que toute jeune fille sache ceci : ce qu’elle a de plus essentiel à faire, c’est de devenir une femme véritable, c’est-à-dire une femme maternelle. Bien sûr, se marier, donner la vie à un enfant, ce sont des choses qui ne dépendent pas seulement d’elle, mais cela ne doit pas l’empêcher de devenir une femme maternelle. Tout le reste — culture, profession, considération, bonheur personnel — ne vient que bien après, car Dieu a spécialement créé la jeune fille pour qu’elle devienne cette femme-là, une femme maternelle.

Et si elle ne le devient pas, si elle évolue dans le sens d’un être a-maternel de sexe féminin, ou même d’un être humain sexuellement neutre, il y aura, à l’opposé, un jeune homme qui deviendra un être non viril, un homme paternel qui sera perdu. Le fait que l’humanité soit maintenue en tant que telle dépend réellement du fait qu’il y ait ou non dans le monde suffisamment de femmes maternelles et d’hommes paternels. Autrement, nous nous acheminerons, en l’espace de quelques siècles, vers une société faite de robots vivants, dominés par des machines à penser électroniques que nous servirons comme des esclaves. En revanche, la communion personnelle de l’homme et de la femme, des parents et des enfants, ne peut être brisée par aucune puissance au monde ni par aucun démon.

Cet exemple de l’amour maternel nous enseigne une loi fondamentale de l’esprit, valable partout. L’amour de Dieu n’est pas une sorte d’amour qui éliminerait les sentiments humains pour les remplacer par des sentiments « divins ». Il n’efface pas les qualités spécifiques des sentiments du cœur humain ni les formes particulières des sentiments de l’inconscient collectif; il n’annule pas la nature humaine. L’amour de Dieu est la base de tout amour humain, un peu comme la chaleur du soleil est le fondement de toute chaleur terrestre; car c’est la chaleur du soleil qui a fait pousser les arbres et a ainsi formé le charbon, elle a synthétisé le pétrole, elle a aussi amené aux montagnes l’eau qui ensuite actionne nos centrales électriques. L’amour de Dieu a éveillé en notre âme les sentiments les plus divers et c’est lui qui est à la base du caractère humain, et non végétal ou animal, de notre nature.

La mère chrétienne s’efforcera en toute humilité et en toute confiance de laisser monter dans son cœur les sentiments maternels que Dieu y a placés au commencement de l’espèce humaine. Certes, au cours des âges, cet amour maternel a produit certaines pousses assez singulières qu’il a fallu couper, de même qu’on émonde tout sarment qui porte du fruit afin qu’il en porte encore davantage. Mais ce n’est pas pour cela qu’elle arrachera de son cœur le tronc du sentiment maternel ni qu’elle en détruira les racines inconscientes. Il ne s’agit pas d’établir une opposition, absolument non biblique, entre l’amour « naturel » et l’amour « chrétien »; il s’agit de favoriser et d’affermir, à travers l’amour de Dieu, celui que Dieu a placé dans le cœur des êtres humains et, en particulier, dans celui de la mère.